En ce moment, le roman qui accompagne mes voyages en métro (le seul moment actuellement ou je trouve du temps pour lire autre chose que mes cours pour le concours), est La face cachée de Margo de John Green, dont on n’arrête plus le succès puisqu’après Nos étoiles contraires, une adaptation en film est en cours de préparation.
Je ne peux que comprendre ce succès : je n’ai jamais arrêté de lire des romans dits « pour ados » (enfin si, peut-être entre les âges de 18 et 19 ans et demi, quand je passais le bac et commençais mes études superieures, où j’avais l’impression que si mes camarades voyaient que je lisais autre chose que Boris Vian, Le prince de Machiavel ou l’intégrale de Bourdieu, je serais lapidée sur place) (les 2 dernières références étant imposees par les cours). Il a fallu du temps, et la découverte de la blogo littéraire pour m’apercevoir que je n’étais pas la seule à lire des romans ados, et surtout à l’assumer. Bref, depuis tout ce temps, j’en lis, mais un peu comme un « guilty pleasure » comme disent les anglo-saxons, sans en attendre trop.
et pourtant je me souviens, lorsque j’ai lu mon premier John Green, Will&will, avoir eu l’impression de voir une tornade de sentiments oubliés, que je croyais enfermés avec les souvenirs du passé, me revenir. Je me suis souvenu a quel point certains romans, certaines histoires ont pu me faire vibrer, quand plus rien ne comptait que cet univers, quand j’avais presque envie d’être un des personnages du roman et quand, une fois la dernière page refermée, je me sentais si seule, nostalgique d’une histoire qu’il me fallait quitter. L’adolescence me semble être une période propice à la mélancolie, en tout cas la mienne le fut. Non pas que j’étais vraiment malheureuse, au contraire, mais soupirer en imaginant ce qui transformerait une vie un poil ennuyeuse en une série de péripéties exaltantes (indice : je devais rencontrer un gars torturé qui deviendrait un immense artiste et qui évidemment, fatalement, me rendrait très malheureuse) tout en écoutant en boucle Jeff Buckley pendant que la pluie frappait les carreaux de ma chambre me semblait incroyablement romanesque.
c’est drôle de repenser à ça aujourdh’hui, car jusque récemment, j’avais le sentiment d’être a peine sortie de l’adolescence. Je ne sais pas a quel moment un changement s’est opéré, lorsque j’ai cessé d’être « presque encore » ado, mais le fait est la, que l’on vieillit sans s’en rendre compte et qu’on se retrouve à faire des soirées ou on boit du vin et où on mange du fromage avec ses amis tout en potinant sur les gens avec qui l’on a fait nos études pour savoir qui s’est marié l’été dernier, au lieu de se demander « non mais tu penses que je lui plais, après toutil m’a dit à plus ?? » (Référence à une autre série de romans sans laquelle mon adolescence aurait été plus ennuyeuse, celle de Georgia Nicolson).
quand on est étudiante et que l’on rencontre un garçon, on se croise en cours et en soirées. On s’enflamme sur cet album de ce chanteur qu’on vient de découvrir parce que forcément, on découvre son groupe préféré tous les 3 mois, on n’a eu que si peu de temps pour connaître le vaste monde. Quand on connaît mieux ce garçon, on a envie de lui parler de nous, de notre passé, mais forcément, ce passé se limite aux livres qu’on a lus pour le bac de français, aux copines de 2de B et à ce pauvre type qui nous a larguée par texto, qui n’en valait absolument pas la peine et pour lequel on a pourtant pleuré des heures en écoutant les chansons de Coldplay les plus de primantes qui soit (parce que même si Buckley reste le Must pour pleurer sur son sort, on n’allait quand même pas gâcher ses chansons en les associant à jamais à cette rupture). On a l’impression que notre vie commence maintenant et qu’on la construit chaque jour avec le garçon, qui fait exactement la même chose que nous.
puis on grandit, le diplôme en poche, le stage de fin d’études passé, on quitte à regret la vie d’étudiant, même si on s’y fait et qu’après tout, on se sent tellement mieux maintenant que quand on avait dix-huit ans. On évolue, et l’étudiant qui nous fascinait parce qu’il lisait l’intégrale de Sartre devient pédant, et puis après tout il n’aime ni Boris Vian ni Jeff Buckley (parce que même si on change, il existe heureusement des choses qui restent immuables, comme notre amour pour certains artistes), alors on ressort l’album de Coldplay du placard dont il n’était pas sorti depuis des années, pour se donner du courage pour prendre une décision difficile. Et puis comme on n’a plus 15 ans, on subit moins ce qui nous arrive, et on sait que le prochain garçon saura nous apprécier a notre juste valeur.
et pendant qu’on a évolué, qu’on est passée des apéros chips bière aux soirées dans les bars à vin, il est arrivé, ce nouveau garçon. Enfin, maintenant, on a grandi, alors on peut laisser les garçons et utiliser le terme plus adapté bien qu’un peu grandiloquent d’homme. Il est beau, il sent bon le sable chaud, on a l’impression de retrouver nos papillons dans le ventre d’ado, parce qu’il nous fait rire et qu’on peut lui déclamer des poèmes de Victo Hugo sans qu’il nous trouve ridicule, même qu’on a l’impression que ca lui plait. Et puis il grand, alors il porte des chemises propres, sait faire la vaisselle et le ménage, c’est quand même plus agréable.
Mais lorsqu’on apprend à mieux le connaître, on découvre une chose qu’on n’avait pas du tout anticipee : c’est que contrairement à l’étudiant, avec qui on avait grandi, dont les évènements de nos vies étaient ccomplètement liées a notre relation, celui-là, son passé ne se limite pas a ses annees lycée. Il y a forcément d’autres filles, dont on ne sait rien, mais il y a aussi tout ce qu’il nous raconte, ses souvenirs bon comme mauvais. Et la, apparaît un sentiment de nostalgie profonde, lorsque l’on réalise qu’ il y aura pour toujours une partie de sa vie que l’on aura pas partagée. On aurait tant aimé être la, pour tel événement qui avait l’air si drôle, ou un autre car on voit a quel point ça l’a marqué. Mais non, on ne peut pas, on ne pourra pas. La plupart du temps, on s’en moque, et puis au détour d’une phrase, c’est plus fort que tout, on est prête a se ruiner la soirée par jalousie vis à vis de quelqu’un dont on ne sait tellement rien, ni le nom, ni à quoi elle ressemble, ni sa chanson préférée, au point qu’elle est une sorte de fantôme. Pourtant, rien n’y fait, on aurait voulu que ce soit nous et pas elle qui ait vécu ce moment. C’est une façon de penser un peu extreme, voire carrément effrayante (allo ui cer la fille un poil psychopathe et qui veut tout contrôler), alors on renvoie toutes ces pensées au placard, où, tiens, elles retrouvent le fameux cd de Colplay (entre choses déprimantes, ils ont de quoi s’entendre).
Mais parfois ça revient quand même, alors il y a des soirs ou l’on n’a qu’une envie, celle de ressortir l’album de Jeff Buckley, en lisant John Green, pour se raccrocher à l’ado que l’on fut, pour trouver une bonne raison d’être nostalgique.